Avr 11, 2006 - Côté professionel    No Comments

refonder l’OCCE ?

L’OCCE occupe la position qu’il a actuellement parce qu’il a capté le marché de l’argent de l’école.Aurais-je dû préciser : « a su » capter ou bien « a pu » capter ?La composante économique est un des axes fondateurs du mouvement : en 1922, alors que le mouvement associatif est essentiellement représenté par la Ligue de l’Enseignement fondée par Jean Macé, une Commission Nationale de l’Enseignement de la Coopération est créée par la Fédération Nationale des Coopératives de Consommation.
Deux courants s’opposent alors : Emile BUGNON, fondateur des « Coopératives de Lorraine », sous l’impulsion de Charles GIDE, pensait utiliser les coopératives scolaires pour pallier les insuffisances économiques. Barthélémy PROFIT, sans rejeter les idées de son collègue inspecteur, souhaitait leur donner une part d’autonomie par rapport à la Fédération Nationale des Coopératives de Consommation. Il n’hésitait pas à parler de « cette petite république qu’est la coopérative ».1928 voit la naissance d’un Office Central des Coopératives Scolaires devenu, en 1929, l’Office Central de la Coopération à l’Ecole. C’est une association nationale, régie par la loi de 1901, dont le président, le premier de l’O.C.C.E., sera Emile BUGNON.Les successeurs de ces deux pionniers de la coopération scolaire surent allier ces deux tendances : l’entreprise de production marquée par l’initiation aux problèmes économiques et « l’école organisée socialement » en y ajoutant, avec l’apport de Célestin FREINET, une troisième dimension : la transformation de l’école traditionnelle en une école moderne où les valeurs pédagogiques prennent toute leur importanceAinsi donc dès le départ l’axe de gravité de l’OCCE oscille entre la dure réalité économique et le volet pédagogique qui émerge et se structure autour de l’école nouvelle.Un équilibre et un consensus s’établira alors progressivement faisant de la gestion des petites sommes des coopératives scolaire un outil au service d’une nouvelle forme de pédagogie. L’OCCE, mouvement « subversif » mais utile s’intalle au coeur de l’école.Cette situation a perduré jusqu’aux années 80 mais deux éléments sont venus progressivement changer la donne.Sur un plan pédagogique l’institution a, en grande partie, intégré dans ses pratiques ce qui faisait l’originalité des principes et des pratiques de l’école nouvelle. Dans les années cinquante l’instit qui produisait un journal de classe avec ses élèves qui démontait son estrade et organisait des moments de parole, qui faisait écrire des textes libres … apparaissait comme une sorte d’hurluberlu…
De nos jours tout ceci est devenu la norme !Le deuxième élément c’est l’accroissement des flux financiers qui transitent dans l’école avec comme corollaire le vide juridique et sidéral qui accompagne ce mouvement : aucune structure prévue pour gérer ces sommes.
Tout a baculé quand, au fil des années, on a changé d’échelle : les sommes d’argent transitant dans les « coopératives « ont évolué de manière exponentielle…
Pemettez moi de m’appuyer sur une anecdote pour illustrer mon propos : au début des années 90 je prenais la direction d’une école élémentaire à la suite d’un collègue qui partait en retraite après avoir effectué toute sa carrière dans cette école… Au moment de la traditionnelle passation des consignes , à un moment de nos échanges le voici qui m’annonce « tiens voilà la coopérative »… la coopérative en question c’était une boite en carton, vous savez une de ces petites boite bien solide destinée à l’origine à contenir du papier photo kodak.La coopérative c’était ça : une « jolie boite « (elle était recouverte de papier peint) et qui contenait quelques pièces de monnaie…
On est passé de cette situation : petite sommes résultant du travaux d’élèves aux flux financiers d’argent public, subvention municipales, académique voir fonds européens … Dans une école on gère des contrats de maintenance, des emplois, des transports, de l’argent public …La limite avec la gestion de fait est souvent ténue…Et pour supporter légalement tout ça …Rien…Sauf le débouché naturel de la coop …Et ce qui devait fatalement arriver… est arrivé.
Ce qui n’était au départ qu’un instrument au service dun mouvement pédagogique, est devenu une finalité en soi UN OUTIL DE GESTION coupé dans l’esprit d’une immense majorité de son origine pédagogique.
La réalité c’est que l’OCCE est devenu la banque de l’école… pour la majorité de ses « adhérents »adhérents à un mouvement ? Non adhérent à un service …L’activité principale de toute association départemental ce n’est plus la pédagogie, c’est la gestion. On est dans une telle politique de l’autruche à tous les niveau que l’on peut se permettre de gérer approximativement tous ces flux financiers. Le contrôle des comptes, les bilans financiers justes ? tout ceci n’est qu’une gigantesque farce !Disant cela je ne dis pas que les gestionnaires de coopérative, directeur d’école pour la plupart sont des truands et des escrocs .. Non bien au contraire il faut faire une différence entre « incompétence » totalement justifiée et malversation.Le système tient grâce au dévouement et aux efforts sans limite des collègues, les malversation existent ,elles sont à la marge et jouissent de l’impunité (les rappels douleureux sont ils nécessaires …)mais cette réalité, l’OCCE ne veut pas la reconnaître clairement… On continue d’avancer derrière le masque du mouvement pédagogique…Une réflexion sur le mouvement ??? Oui à la limite en petit comité, de manière confidentielle dans les Journées Fédérales avec des comptes rendus en accès limités… Mettre tout ça au grand jour sur la place publique largement ouverte … vous n’y pensez pas ! Nous sommes un mouvement pédagogique !!! Et allons y d’une nouvelle université d’été…Et on continue de détacher des enseignants pour assumer des tâches pour lesquelles dans la majorité ils ne sont non seulement pas compétents et c’est normal mais pour lesquelles ils n’ont aucun goût ou intérêt…Heureusement ou malheureusement pour eux il y a encore des collègues qui y croient encore, pour qui l’OCCE c’est la coopé avec les gamins dans la classe ou l’école mais leur fait acquitter, comme aux autres, une cotisation de plus en plus élevée destinée à faire fonctionner une grosse machine administrative au rendement médiocreAdhérer à l’OCCE revient en fait souscrire une assurance pour « faire tourner » son école … gérer les comptes au mieux avec l’assurance qu’en cas de pépin on evacuera le problème vers l’association départementale…Oh mais on ne dit pas les choses comme ça ! On ne l’avoue pas on clame haut et fort le contraire et on agite le hochet de quelques bonus : la rencontre machin, le concours bidule, le prêt de la valise truc qui n’intéresse plus personne … à quoi bon traverser le département pour obtenir en prêt ce que l’on a déjà dans l’école ou à la circonscription ? Ah oui ! si quand même ! on peut gratter un peu d’argent sur un projet, il suffit de badigeonner un peu de « coopératif » sur un vague formulaire … de toute façon s’il y a un contrôle dans l’école ce sera sur les comptes pas pour passer un moment avec les gamins pour discuter du projet pédagogiques.Le temps est venu de balayer les hypocrisies : on se gargarise (moi le premier !) de nos 4,5 millions d’adhérents … mais combien sont-ils parmi nos 4,5 millions d’adhérents à savoir qu’ils sont membres de l’OCCE ???Alors on tente de se rassurer en se convaincant que oui , certes, on est perçu comme un service bancaire … mais que finalement, voyez vous … et bien ça nous permet de financer des actions des activités coopératives et tout ça …Tout cela n’est pas entièrement faux … mais franchement ???Permettez moi encore une digression : quand je suis arrivé en Turquie j’ai eu le plaisir de trouver dans mon école une coopérative dont mes collègues m’ont annoncé triomphalement que j’en étais le président… Bon très bien, voilà qui m’amenait en terrain connu !Naturellement une coopérative non adhérente à l’OCCE (à l’époque où je faisais partie du groupe de travail sur la réforme des statuts et sur la circulaire de 48 nous avions cherché en vain la possibilité de permettre l’adhésion des établissements de l’étranger…)Bien, qu’est ce que c’était cette coopérative ? Et bien un grand fourre tout : des intentions affichées de mise en oeuvre dans l’école, avec les enfants, d’un projet d’éducation citoyenne fondé sur des principes coopératifs mais surtout une solide entreprise économique, à savoir la gestion des activités périscolaires. (Les cours finissant à 13H 30 il fallait bien occuper les gamins l’après midi …) Donc un très gros budget (presque une école bis) avec salaires, location de salles, matériel etc … Oh bien sûr, des bénéfs reversés à l’école et pour emballer le tout des statuts vaguement calqués sur une coop OCCE (avec un élève« président »)…Quel a été dès lors mon action ? Et bien clairement séparer les structures en les dotant chacune de statuts appropriés :
- une « vraie » coopérative d’élèves avec ses propres statuts et un objectif clairement affiché : vivre la coopération dans l’école. Avec au passage un volet économique mais géré par les enfants avec leurs moyens au service de leur propre projet.
- une coopérative d’adultes avec les parents et les instits et un objectif clair : faire « tourner la boutique, », dégager du bénéf et le réinvestir dans l’école.
En clair ne pas mélanger les genres… Avant mon départ j’en étais déjà sur cette démarche : coop de classe/coop d’enfants/ outil pédagogique, et coop d’école coop d’adultes/outil de gestion.Donc j’en reviens à la situation actuelle :Devons nous continuer à entretenir la confusion et à fonctionner comme nous fonctionnons ?Devons nous rester suspendus à des décisions gouvernementales pour pouvoir exister et nous partager les moyens au prix de discussions « coopératives » (…)
Je pense qu’il est possible d’obtenir notre indépendance et notre autonomie.Pour cela toutes choses identifier et séparer clairement les structures au sein d’une seule fédération :
· un mouvement pédagogique clirement identifié au service de la pédagogie coopérative, association d’enfants…
· un organisme de gestion coopératif d’école au service d’adultes pour le fonctionnement de l’école. Reconnu comme tel et intégré dans l’institution…
Pour le premier des détachés enseignants qui ne se soient pas des « professionnels à vie de l’OCCE » et qui viennent épauler le travail des militants et des bénévoles qui, désormais libérés de toute contrainte financière, se consacrent uniquement à la pédagogie. Pas de détaché à mi temps non plus mais des missions qui n’excèdent pas deux à trois ans avant retour vers le terrain … Dans un premier temps s’ils doivent être moins nombreux, qu’ils soient affectés prioritairement pour accompagner les projets forts ou les AD en panne de projet coopératifs… Pour le deuxième des personnels privés qualifiés dans le domaine juridique comptable et bancaire, pas des pédagos mais formés aux besoins spécifiques de l’école. Des personnels qui puissent répondre précisément aux besoins des écoles en allégeant au maximum la tâche des directeurs les premiers concernés par les charges de gestion. Et nous disposons déjà de personnels compétents ! Ces structures départementales dépendraient directement de la fédération à Paris… comme c’est déjà le cas pour tout ce qui concerne les comptes, le contrôle, les cas litigieux etc. Au passage que la Fédération soit elle aussi étoffée en personnels privés.Que cette deuxième forme d’organisation conserve clairement une forme associative et coopérative, mais à destination des adultes .
Pourquoi associative ? Et bien, ne nous leurrons pas la transformation des écoles en EPLE dotés d’une autonomie financière fait certes son chemin mais le couvercle est très lourd à soulever. Le poids des communes , le tissu qui fait la France ne se déchirera pas comme ça… et il faudra encore du temps…C’est pourquoi, je reste convaincu que l’organisation associative constitue une réponse appropriée dans le contexte actuel.La deuxième étape consistera à étoffer le champ d’action de cette structure, la marge de progression est grande … il y a bien plus de 4,5 millions « d’adhérents » potentiels … Dans un troisième temps les moyens dégagés par la gestion des écoles permettraient de financer des détachés pour animer les projets des coopés d’enfants … les vraies … et de fournir des subventions aux projets coopératifs.En conclusion je pense que le moment est venu de transformer en profondeur l’OCCE :
- de briser l’amalgame et de reconnaître qu’il convient de traiter de manière différentes les coopés des enfants et la gestion de l’argent dans l’ école,
- d’accepter le principe de remplacement des MAD par une subvention et contre la reconnaissance et le soutien institutionnel de la structure « gestion de l’argent de l’école ».
- d’affecter cette subvention au recrutement de personnels privés,
- d’étendre le champ d’action de cette structure,
- de réaffecter progressivement des détachés aux AD sur fonds propre et pour des missions à caractère pédagogique exclusivement.
- De redonner du sens aux coopératives d’enfants dont les cotisations ne seraient plus que symboliques et l’objet pédagogique.En fait je me suis suis souvent posé la question : et qu’arrivera t-il le jour où une structure « X Y » proposera aux écoles un support légal, simple, bon marché doté d’un soutien pour assurerla gestion de l’école ???

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dacosavoile

 
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