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Nov 10, 2012 - Côté personnel    No Comments

Ode à l’automne

« J’écris ces lignes depuis mon séjour de repos, traditionnel à cette époque de l’année : la campagne. Je crois que j’ai raté le meilleur de l’automne. C’est-à-dire le moment où les feuillages virent au feu dans les forêts de feuillus. Ce que j’en vois à présent me semble plus piteux. Mais il pleut, c’est vrai. Le ciel est bas, la lumière pauvre, le ciel sale dégorge sans grâce. C’est le mois du ressac dans la nature. Je n’y ai jamais été à l’aise. C’est un temps de cimetière et programmé comme tel par les êtres humains depuis des millénaires. Prenons la vague comme elle est. Demain il fera beau de toute façon. » (*)

 

J’aurais aimé écrire ces mots… hélas je n’ai point ces talents de plume…

Et puis moi j’aime cette saison.

Le temps de la pluie et des cimetières, le temps des commémorations de novembre, des souvenirs des poilus de 14, des ciels chargés de lourds nuages gris et des trouées de soleil qui éclaboussent de lumière voilée les pavées mouillés de la ville.

Les souvenirs d’un bel été s’enfouissent en douceur dans la quiétude de l’automne. L’odeur des feuilles brûlées au fond des jardins dans les tonneaux de fer rouillé des pavillons de banlieue m’enivre de souvenirs perdus.

La nuit qui efface le jour, si tôt, déjà, et les réverbères qui clignotent dans les rues de la ville.

La chute, la descente, mais la promesse inéluctable d’un nouveau printemps et des lumières retrouvées après l’hiver qui s’annonce déjà. Le soleil, la vie mais avant le feu qui crépite dans la cheminée,  la neige qui tombe sur la campagne engourdie et la paix des  Noëls illuminés de rouge et de doré.

J’aime cette saison des bilans, du souvenir des nuits d’été, de l’écho de la stridulation des grillons quand couchés dans le pré au bas de la maison nous contemplons le ballet des étoiles filantes des ciels d’août.

Rien n’est plus navrant que la désespérante linéarité que génère l’absence de saison.

Qui n’a pas vécu en Afrique ou en zone équatoriale ne peut imaginer la perte de repère et l’ennui qui s’installe quand le jour et la nuit se succèdent inexorablement à la même heure, que la température ne varie pas et que le temps file sur une une désespérante ligne droite.

Des souvenirs d’automne il m’en vient à foison, comme ce volet ouvert un matin sur une campagne roumaine roussie des feux d’octobre avec au loin les premières neiges sur les Carpathes, nous étions jeunes et pourtant c’était hier.

Mais point de nostalgie, la douceur des souvenirs ne résiste pas à la promesse des saisons qui s’annoncent.

Les rires d’enfants dans le jardin seront plus cristallins et le grand père qui grognera à la fenêtre pour calmer les ébats, ce sera moi…

(*) Jean Luc Melenchon

Juin 26, 2012 - Côté personnel    1 Comment

Postavarul rectified

Puisque voici l’été je m’en vais vous conter une petite histoire de ski, histoire de rafraîchir l’atmosphère.

Gamin, très tôt, j’avais décrété que le ski c’était de la foutaise et que par conséquent je n’y foutrais jamais les pieds.

Olivier et Maman sur les skis et moi sur la luge au Mont Dore en 1967

Manoeuvre de retournement…

Passe encore la luge dont notre père avait construit un singulier modèle. En effet cette luge avait une particularité : partie du haut de la pente, après avoir acquis une certaine vitesse initiale, à l’instar de la fusée lunaire de Tintin, l’engin entamait une manœuvre de retournement à mi pente et terminait systématiquement sa course à l’envers. Tel un rameur sur la Marne, le canotier en moins, nous achevions de dévaler la pente en marche arrière, de dos, le regard fixé sur le sommet au grand péril des clampins se retrouvant sous la menace d’un bolide que les pilotes la tête rentrée dans les épaules et serrant des dents ne pouvaient pas voir (ni éviter…).

Les années passaient, mon frère partait régulièrement pour des séjours de ski dont il revenait étoilé et moi je tenais bon, bien décidé à ne pas me risquer sur ces planches redoutables fixées à des chaussures orthopédiques qui me paraissaient des plus suspectes.

Et puis passe passe le temps, me voici à l’École Normale. Deux facteurs allait bousculer les choses et me faire vaciller dans mes convictions.

D’une part ma chère et tendre était une skieuse hors pair et d’autre part une sortie organisée dans le cadre de nos cours de sport nous avait conduit sur les pentes très modérées du massif du Pilat où j’avais chaussé pour la première fois des skis de fond.

Le ski de fond permet de donner le change.

Le bon skieur se retrouve gros Jean comme devant au premier virage où la sorte de pince à linge qui sert de fixation à la facétieuse tendance à libérer le pied du ski provocant une chute amusante pour le reste de la troupe et fort irritante pour le skieur alpin confirmé qui ne retrouve pas la tenue de ses chaussures orthopédiques. Quant au débutant que je suis, il est facile de faire illusion en se contentant de traîner les pieds sur le plat, les planches bien coincée dans la trace. Pour les descentes et les virages, aucun problème, tout le monde se cassant la gueule en râlant ou en rigolant ou goguenard, c’était selon…

Bref jeune adulte et toujours ouvert sur le progrès et l’évolution j’allais devenir un skieur.

Évidemment, ayant maîtrisé le ski de fond, le passage au ski alpin allait de soi. Et nous voilà dans un magasin de sport lyonnais où un habile vendeur m’équipe de skis révolutionnaires de type compacts « qui tournent tout seuls » (dixit l’escroc)…

Equipé de pied en cap je me retrouve donc par un beau jour ensoleillé juché sur un télésiège à Chamrousse qui monte qui monte, qui monte …

Vue de haut, la pente est bien agréable, le relief écrasé, les bosses fort aimables, les petits skieurs déboulent gentiment avec de jolies traces … Et le télésiège monte toujours…

Ah misère !

Jeté du télésiège comme un sac de patates, grâce à des moulinets des bras et des bâtons je m’immobilise sans tomber en haut de la pente. Immédiatement celle ci s’avère beaucoup plus inquiétante, et étrangement longue, la voiture garée au pied un tout petit point bien lointain. Une angoissante verticalité semble sortir d’une brume irréelle. Un étrange sentiment de malaise s’instille peu à peu…

Et vogue la galère…

Ah misère de misère…

Naturellement ces foutus skis refusent obstinément de tourner, le cul bien en arrière, j’essaie désespérément de fléchir la jambe comme me le braille ma monitrice . Oui tiens, tu parles… vlan me voilà le nez dans la poudreuse et va t’en te relever dans cette saloperie de neige avec ces foutues planches qui bizarrement faute de tourner ont tout de même réussi à se croiser.

Début d’un long calvaire… Plante le bâton, plante le bâton….

Ah oui, je le planterais bien le bâton mais pas dans la neige, non dans le bide de cette enflure de vendeur, cet escroc malfaisant, ce menteur… Oh putain oh merde voilà que ça accélère mais où sont les freins ??? Fléchis fléchis…. tu parles … enfer et damnation pas d’autre solution que de provoquer la chute avant que de passer le mur du son. Vlan de nouveau le groin enfoui dans la neige. Et l’envie de meurtre qui monte, qui monte, à commencer par le vendeur, une fois éventré par le bâton lui écraser la figure à coup de ces saloperie de godasses …

Trente mètres de pente dévalés, trente chutes, reste plus que deux bornes pour parvenir en bas, j’y arriverai jamais avant la nuit… Le désespoir et la rage me gagnent…

Après une demi heure d’effort je parviens à me libérer de ces saloperies de planches ! Ah ! ah! Je vais descendre à pied !!

… En roooooooooooooute…. et paf me voici enfoncé jusqu’à mi cuisse… Coincé fait comme un rat… en glissant à plat ventre peut être….. fuuiiit c’est parti ! Au moins cinquante mètres de dévalé…. oh non …. c’est pas vrai, j’y crois pas … Regarde moi ça ce crétin de ski qui est resté planté la haut et qui me nargue… Désespoir…

La lumière commençait sérieusement à décliner quand, transi, fourbu, une sourde colère me tordant les boyaux je parvins après des heures d’efforts à regagner la voiture à y jeter ces damnés ski en jurant mes grands dieux que l’on ne m’y reprendrait plus…

Était-ce la fin d’une histoire ??

Vous vous doutez bien que non …

La suite intervient quelques mois plus tard, dans les Carpathes où le service national et le début d’un petit périple sur les grands chemins du monde nous conduit

Bien entendu partis pour travailler dur de l’autre côté du mur, en république socialiste de Roumanie, dans ce monde étrange et inconnu, nous n’avions pas eu l’idée d’emporter des skis dans nos bagages…

Et voilà que sitôt arrivés nos collègues nous assurent que le ski est le loisir unique des mois d’hiver… Vous skiez ? Euh ben …oui …

Alors ni une ni deux, sitôt la saison arrivée et pour une bouchée de pain nous voici équipés de superbes skis en bois, du modèle « Postavarul » . De belles et bonnes planches bien raides, au moins aussi longues que mes skis révolutionnaires et dotés de fixation allemande de l’Est en aluminium gris, copie conformes en miniature des casemates en béton du mur de l’Atlantique. L’ensemble est rustique mais fonctionnel moyennant un calage de la godasse avec du papier cul pour éviter de déchausser en éternuant.

Direction les Carpathes, Sinaïa où l’équipe de l’école française, au grand complet, directeur en tête, loue une superbe villa face au château de Vlad Tépès, Dracula pour les intimes.

Dopé au Murfatlar, un petit pinard bien sympathique, entraîné par le groupe je décidais donc de me colleter de nouveau aux affres de la descente. La montée se faisant en téléphérique pas de problème pour accéder aux pistes.

Hélas, point de miracle, les Postavarul contrecarraient aussi bien que leurs homologues Rossignol toute tentative pour changer de direction. Heureusement les fixations kalité allemande (de l’est) qui lâchaient au moindre choc me permettaient de sauver la face : « Ah merde ! Foutu matériel » si seulement j’avais mon matos laissé en France, vous verriez les copains …

N’empêche qu’intérieurement je ruminais un plan despéré pour me sortir de ce piège à rat… En fait tout le problème venait de derrière… A chaque tentative de virage je sentais bien que la difficulté venait de l’arrière… De ces ski beaucoup trop longs… derrière.

Et c’est ainsi qu’après une dernière lampée de Murfatlar la lumière fut et que la solution m’apparut dans un éclair de lucidité géniale…

Sitôt rentré à Bucarest j’annonçais que j’avais trouvé une solution et qu’on allait voir ce qu’on allait voir : j’allais scier mes skis et les réduire de moitié histoire de virer tout cet arrière train source de mes malheurs.

Concert de protestation « non mais t’es pas un peu marteau, ça ne se fait pas de couper des skis, l’équilibre, la stabilité … Tout ça »…

Tu parles Charles, au point où j’en étais, foutu pour foutu, on allait voir ce qu’on allait voir.

Et c’est ainsi que muni d’une scie égoïne je découpais un généreux tronçon de mes Postavarul que je baptisais illico « Postavarul rectified » à l’aide d’un petit pinceau et de peinture blanche… Le soucis du détail…

Et bien croyez moi si vous voulez mais équipé de mes Postavarul rectified, de mes fixations allemandes de l’est renforcées au PQ : JE FAISAIS ENFIN MES DEBUTS EN SKI ALPIN !

Inaugurant une nouvelle technique, le chasse neige TGV, (chasse neige à très grand vitesse), au grand dam des puristes de la godille au cul pincé et au style serré, je dévalais les pentes bras écartés, popotin bien en arrière, secoué comme l’autorail entre Saint Etienne et le Puy mais capable de m’arrêter dans un virage dérapage des plus efficaces…

Le style était certes particulier mais je parvenais à virer et ce faisant à sauver ma peau et mon honneur.

 

dacosavoile

 
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