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Fév 10, 2012 - Côté personnel    5 Comments

Ma petite banane de Proust…

Narguant le réchauffement planétaire, le froid  s’est abattu sur nos villes et nos campagnes. Le paysage se fige, les rivières sont prises par les glaces, le gasoil s’épaissit dans les réservoirs des véhicules… les déplacements se font plus difficiles, la gelure peu à peu nous engourdit.

Billevesées quand on songe au grand « hyver » de 1709 !  Moins 30° à Paris, la Seine totalement gelée ne permet aucune navigation, les vivres ne parviennent plus à la capitale. Au château de Versailles, Louis XIV lui même se voit contraint d’attendre que son vin daigne bien dégeler près du feu, ce dernier se figeant rien qu’en traversant une antichambre…

Calfeutré dans mon nid d’aigle de l’avenue Foch que je peine à réchauffer, je songe en terminant mon repas du soir… Mais d’où vient cette banane qui me tient lieu de dessert ?

Fruit du soleil et des tropiques échoué dans cette contrée gelée… pourquoi cette banane ravive d’un coup tant de souvenirs ?

Il me revient en mémoire notre jardin de Dar Es Salaam et ses petites bananes que nous ne mangions jamais, boulottées qu’elles étaient à peine mures par le jardinier. Nous ne faisions pas d’histoire, Marie rapportait du marché des paniers entiers de légumes et de fruits tous plus beaux les uns que les autres … et puis on racontait tant d’histoires sur ces petits serpents noirs cachés au coeur des régimes et qui, s’ils vous mordaient, vous faisait passer de vie à trépas en quelques minutes.

Dans le jardin une demoiselle nommée Charlotte  se balançait sur une balançoire de bois , Timy à quatre pattes grattait la terre d’Afrique et Jean-Marie mal éveillé de sa sieste couinait au seuil de la maison son biberon d’eau à la main.

Il faisait chaud dans la touffeur tropicale  de ce jardin où il y avait peu d’ombre.

Mais pourquoi fichtre donc  la banane s’associe t-elle dans mon esprit à un une image  de glace et de froidure ???

J’y suis ! L’image subliminale qui se forme c’est celle du bananier, du Chiquita Banana, que nous apercevions chaque jour en franchissant le grand pont au dessus du port de Göteborg pour rejoindre le centre ville. Chaque matin un nouveau navire déchargeait ses containers de bananes. En hiver la rivière Gotha où s’amarraient les bateaux charriait des glaces dans le petit jour blafard de ces contrées boréales…

Et puis plus vieux encore voici que remonte une savoureuse histoire de bananes … Imaginez vous pourquoi pendant 24h Sofia devenait une ville dangereuse aux trottoirs glissants ?

Glace ? Gel, verglas  ?

Pas du tout : la banane encore !

Dans les glorieuses années du socialisme triomphant la pénurie régnait sur les étals des marchés de l’est et les fruits exotiques n’étaient que du domaine du rêve pour le bon peuple.

Fort heureusement le papa de Pépito, un de nos plus brillants élèves de l’Ecole Française, ci devant ambassadeur d’Equateur, avait une mission capitale chaque année : organiser l’arrivée et le déchargement d’un bananier en provenance d’Equateur au port de Varna.

Le vulgum pecus, qui ne bénéficiait pas des magasins spéciaux de l’aristocratie rouge  régnante ne pouvait que rêver de ce fruit mythique. Alors quand une fois par an une distribution miraculeuse s’annonçait, c’était  la ruée dans les épiceries !

Mais conséquence de l’impatience, de la gloutonnerie, de la gourmandise tous s’empressaient d’avaler béatement, les yeux mi clos, une deux, voir trois bananes en sortant de la boutique et comme c’était l’usage, de balancer illico les peaux sur le trottoir…

Et voilà pourquoi il fallait veiller où l’on mettait les pieds sur les trottoirs de Sofia quand arrivait le bananier tant attendu du papa de Pépito pour ne pas risquer de se rompre le col en glissant sur une peau du beau fruit jaune…

Enfin dernier souvenir, il me revient au palais le goût parfumé de ces toutes petites bananes de la côte égéenne de la Turquie bien plus savoureuses que ces grosses fades bananes de nos supermarchés …

………….

épilogue : un caisse de bananes à celui ou celle qui postera le commentaire attendu concernant la banane… même si on se doute que c’est encore l’estonien qui raflera la mise !

Nov 17, 2011 - Côté personnel    2 Comments

Là où la Camargue se déglingue.

Ben tiens ça fait une paye que je n’ai pas respiré l’air iodé, coincé que je suis dans mes montagnes. Le crétinisme des Alpes ne risque t-il pas de m’atteindre ? N’est- il pas déjà trop tard ? De l’iode, vite où je fais un malheur !

Toujours est-il que l’envie me  prend d’aller traîner mes basques du côté de la grande bleue.  Mais attention ! La vraie, pas la mare aux harengs et ses marées pas marrantes.

Mare Nostrum, la belle bleue, Méditerrrrannnée ….

Méditerranée
Aux îles d’or ensoleillées
Aux rivages sans nuages
Au ciel enchanté
Méditerranée
C’est une fée qui t’a donné
Ton décor et ta beauté
Mé-di-terranée !

Pourtant pas question d’aller frayer dans une quelconque station balnéaire. Non, moi j’ai plutôt une attirance pour les friches industrielles portuaires et une tendresse infinie pour ces cargos rouillés, usés par les coups de chien des vents d’hiver, cabossés par les accostages approximatifs d’un capitaine alcoolique.


C’est donc en suivant le cours de mon fleuve préféré, traversant la Provence, les Alpilles et la plaine de la Crau que j’atterris à Port Saint Louis du Rhône.

Sitôt stationné le long d’un quai défoncé au bord du fleuve, hop,  j’extraie ma bécane du coffre de la voiture, je le déplie et roule ma poule !

Le vent marin souffle avec obstination et je dois appuyer sur les pédales de mon Brompton avec la vigueur enthousiaste d’un coureur du Tour de France luttant pour éviter la bordure afin de  progresser dans ce paysage tourmenté.

Ici la Camargue se déglingue en étangs, zone de stockage, cabanons, usines écroulées, grues, bassins de plaisance, chalutiers paumés. Des grues et des silos surgissent au fond des marécages. C’est samedi, l’activité est réduite mais on croise encore des camions trimbalant des containers et des camions citernes partis ravitailler les pompes de  l’arrière pays.

 

Amarré le long d’un quai désert, un fluvio maritime bancal semble bien seul. Hélas les grands navires sont plus loin, inaccessibles dans les enceintes fermées des ports de commerce.

Dans la rade, les pétroliers poireautent au mouillage en attendant d’aller vider leurs cuves d’or noir dans les terminaux pétroliers de Lavéra.

Le long de la plage, le vent du sud propulse les lascars en kite surf  qui s’envolent et batifolent dans l’écume et les vagues.

Sur un parking poussiéreux, serrés comme des harengs des dizaines de boites à vieux à roulettes sont parquées… ah  les joies du camping car, le parking de Carrefour aux heures de pointe !

Ce n’est plus l’été, les cabanons sont désertés, ce n’est pas encore l’hiver et la journée est douce.

Encore un instant monsieur le bourreau, encore une bouffée d’air du large avant de remettre le cap au nord et retrouver mes volcans assoupis…

 

dacosavoile

 
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