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Fév 18, 2014 - Côté personnel    No Comments

La belle du Gévaudan

Séquence belle, bête et belle… du Gévaudan.

Cinéma tout d’abord avec le superbe film de Christophe Gans, un joli moment de poésie… L’ombre du film de 1946, Jean Cocteau et de Jean Marais, plane derrière le masque de la bête de 2014…

Mais nous avons la prodigieuse chance de vivre une époque exaltante où la technique sublime la création. Au diable les pisses vinaigres de la critique, le rêve, le bonheur se déploient en majesté dans ce film … Les contes de notre enfance s’écrivent en lettres numériques dans une féerie de tableaux tous plus merveilleux les uns que les autres… Dans cette nouvelle lecture de l’œuvre, qu’importent les acteurs… Ils sont d’ailleurs au rendez-vous … Dussolier et Léa Seydoux et la bête bien sûr, Vincent Cassel.

Mais une bête peut en cacher une autre …

Je viens de refermer le livre de Bernard Soulier : « Sur les traces de la Bête du Gévaudan et de ses victimes » … L’envie me vient d’aller racler les bois et d’arpenter le vieux pays de Gévaudan sur les traces du monstre.

Alors par un beau dimanche de février en route vers la montagne de Margeride !

Les grands chemins me conduisent sur les traces de la bête… La pouzzolane crépite sous la voiture mais l’hiver n’est pas bien méchant, la neige ne se tient guère que sur les pentes du Mont Mouchet. C’est dimanche, les cloches d’un village isolé appellent les fidèles à l’office… Combien sont-ils encore ? Le pays n’est pas un désert mais de grands pans de solitude balaient cette contrée austère.

A tous les coins de rond point, la statuaire en bois, en bronze, célèbre la bête et les combats héroïques qui l’oppose aux autochtones. Le coin d’un rond point c’est le lieu idéal pour loger la quadrature du cercle, allumer la goutte d’eau qui met le feu aux poudres, résoudre le mystère de la Chambre Jaune et des boules de gomme, éclaircir la théorie du complot, rompre le pacte des loups et engloutir les épinards de Popeye…

Le village Auvers c’est tout prêt d’ici que Chastel terrasse enfin la Bête…

La bête est vicieuse, elle croque du croquant à tous les coins de bois. Le palais délicat, elle se délecte plutôt de jeunes bergères, de tendrons et de galapiats… Insaisissable, elle se joue des battues et des Dragons envoyés par le roi pour zigouiller l’infâme animal…

Fi donc ! alors qu’Internet n’existe pas encore, elle se paie le luxe de créer le buzz dans le royaume et même au delà des frontières ! On se fiche ouvertement de la fiole du roi ! Celui ci prend la mouche, il dépêche ses meilleurs portes flingues pour liquider l’impertinente bestiole… Peau de balle ! La bête continue son sinistre festin. Pour tenter de couillonner l’animal on va jusqu’à travestir les soldats en femme ! L’affaire vire au grand Guignol, c’est la cage aux folles en Gévaudan …

Il faut en terminer avec ce cirque macabre, alors Monsieur Antoine finit par trucider un gros méchant loup du côté des bois de l’abbaye royale des Chazes, On claironne, on crie victoire, on s’empresse d’identifier le coupable, on le reconnaît c’est bien la bête féroce bergèrivore, ça y est ! Vive le roi !

Tu parles Charles ! La bête ricane en douce dans son bois et reprend ses agapes. Sauf que cette fois, motus, défense d’en parler… Circuler, y a rien à voir ! Pendant un an encore la liste des victimes s’allonge.

Jean Chastel : the killer !

Il faudra finalement le coup de tromblon heureux d’un bouseux du coin pour enfin, très probablement, venir à bout du fléau de Dieu .

Le 19 juin 1767, Jean Chastel, à la Sogne d’Auvers abat un gros animal.

Le rapport très détaillé de maître Marin notaire royal à Langeac en dresse un portrait édifiant et précis. Au nombre de quenottes, c’est assurément un canidé mais n’est pas un loup et ce n’est pas un chien non plus. La tête est monstrueuse… les pattes de devant plus courtes que celles de derrière… Bref un vraie sale gueule de tueur de bergères. Ajoutez à cela qu’elle a la couenne truffée de plomb, vestiges de multiples tentatives anciennes de règlement de comptes… Mais les pétoires de l’époque ne valent pas les Kalach de Marseille…

Alors commence la légende…

Qui était vraiment cette fichue bête qui a mis le pays a feu et à sang pendant trois ans  et décimé la corporation des bergères ???

La belle du Gévaudan…

Les délires les plus fous imaginent un serial killer dresseur d’animaux de combat, pèle mêle on accuse le loup, les loups garous, un singe carnivore, des nobles désœuvrées  …

Au final tout semble montrer que l’on à faire à un animal hybride, un croisement malheureux de chien et de loup… Avec quelques bizarreries à la clef qui compliquent l’affaire. La bête décapite bon nombre de ses victimes,  disparaît comme par enchantement pour réapparaître plus loin… Bref elle n’est pas franchement catholique, mais n’est ce pas à tout le moins  ce que l’on est en droit d’attendre d’un fléau de Dieu ?

ou lien direct vers les photos de la balade en Gévaudan

Fév 16, 2013 - Côté personnel    1 Comment

Les bouddhas de Bâmiyân et les canons de Sébastopol…

Dans le fracas purificateur de la dynamite, les talibans d'Afghanistan ont gommé les bouddhas de Bâmiyân du paysage. Quinze siècles d'existence détruits à coup de canon durant plus d'un mois d'effort intensif. Le mollah Omar peut être satisfait en ce mois de mars 2001…

16 mars 2013, la population ponote est invitée à découvrir de près le résultat de la restauration de la statue Notre Dame de France qui domine la ville du Puy en Velay depuis 1860.

Les canons de Sébastopol fondus avaient fourni la matière première pour ériger cette monumentale madone sur l'antique mont Anis.

Las, les outrages du temps avaient sérieusement affaibli la colossale statue qui menaçait rien moins que de s'écrouler… Les édiles de la ville en avaient décidé autrement, soutenus par une kyrielle de donateurs qui décidèrent sa restauration.

Singulière symétrie dans l'espace et le temps, des canons qui construisent à ceux qui détruisent. Statues colossales érigées sur un pic tourmenté pour l'une ou sculptées à même la montagne pour les autres. Étranges résonances de leurs implantations sur les grands chemins du monde : route de la soie et chemin pour Compostelle.

Et jusque dans la passion des hommes… Oui, même dans la paisible cité vélave, il y eut des voix qui s'élevèrent au sein de l'assemblée municipale pour suggérer l'éradication pure et simple de la monumentale statue mariale afin de restituer à la montagne sa pureté originelle…

 

 

Avr 1, 2012 - Côté personnel    No Comments

Sur la trace des fées

Après une longue randonnée dans les sous bois, les prés, les chemins et les petites routes de campagne… Quand le soleil commence à décliner, que les ombres s’allongent et que l’angélus d’ un village lointain tinte dans la vallée…
J’arrive enfin au dolmen de la Tuile des fées

La tuile aux fées

Jadis, avec Pierre et Gladys
On les voyait passer en robe blanche
Au ruisseau qui traînait nos rêves
Vers un écrin de joie
Nous suivions la trace des fées
C’était au mois de mai

Vole, blonde tête folle,
On les voyait quitter leur robe blanche
Un torrent de cheveux dorés
Léchait nos yeux de soie
Nous étions sur la trace des fées
C’était au mois de mai

J’étais le prince sur son carrosse
Ma muse pleurait aux étoiles
Puis je redevins le chien.

Jadis, cachées sous les fleurs de lys
On les voyait flâner en robe blanche
Au pays où la bise enlace les gens aux mille pleurs
Nous suivions la trace des fées
C’était au mois de mai

Vole, vole, blonde nympholle
On les entendait rire en robe blanche
Et le gazon du parc s’imbibait à nos pieds d’enfant
Nous étions sur la trace des fées
C’était au mois de mai

sur la trace des fées

Mar 4, 2012 - Côté personnel    No Comments

Un chemin de fer pour Modestine…

Voyager n’a de sens que si l’on y consacre du temps… Le temps du voyage ne saurait être un temps perdu.


Aussi lorsque me vient l’envie d’une brève escapade en direction des Cévennes toutes proches, la première idée qui me passe par l’esprit c’est évidemment d’emprunter le chemin de Stevenson. Mais la perspective de m’encombrer d’un bourricot, ne  fût ce que pour porter mon bardas, ne me réjouit guère… et puis je n’ai qu’un jour… 

Par chance il reste un moyen tout aussi jubilatoire de voyager : le train !

Pas un avion sans aile à très grande vitesse, pas un de ces trains affublé d’un misérable numéro… Non, il est encore des trains qui portent des noms. Si le Mistral ou le Capitole ont été bouffés par le colombin à grande vitesse… par bonheur il existe encore des trains de légende.

Oui mais attention, il faut faire gaffe, tenez par exemple, L’Orient Express serait bien tentant mais, mais … méfi, le risque est grand de se voir zigouiller à la moindre tempête de neige et pas certain qu’Hercule Poirot soit encore disponible pour débrouiller l’affaire.

Le Transsibérien du père Cendrars (1 ) et de Corto Maltese dans le genre  n’est pas mal non plus mais bon sang, c’est un peu loin et pas vraiment ma direction et franchement je n’ai pas grand chose à faire par là bas en ce moment.

Aussi, voyez comme la vie est bien faite et je te le donne en mille Emile, pour les Cévennes, c’est comme chez Casto … y a tout ce qu’y faut : Le Cévenol !

Ah parle moi de ça ! Un train qui chemine pépère du Velay aux Cévennes en se glissant dans les gorges de l’Allier, qu’est ce que tu veux de mieux ?

Et voilà comment je me retrouve embarqué pour un petit voyage de Langeac à Genolhac et retour par ce beau samedi de mars.

… Pourtant l’affaire s’emmanchait mal …

Huit heure trente, guichet de la gare de Langeac :

– Un aller retour pour Genolhac s’il vous plait …

– A ben… ll va y avoir du retard, le train est rentré dans une voiture à Brassac les Mines. Je ne peux va dire combien, problement une demi heure, peut être plus…

Voilà ce que c’est que de vouloir jouer les aventuriers, on s’expose au pire… Et puis quand ce ne sont pas les voitures ou de stupides vaches qui bloquent les voies et bien ce sont les rochers, chatouillés par le dégel, qui viennent pertuber le périple…

Si, si…  à peine partis, à peine engagés dans les gorges,  le convoi  stoppe dans un crissement de freins et une escouade composée du contrôleur, du mécanicien et d’un costaud de service  descend du train pour pousser l’importun rocher dans le précipice.

Enfin que dire de plus ? Qu’après les embarras du matin le train est arrivé à bon port. Que la gastronomie cévenole en vaut une autre. Que le trajet du retour s’est déroulé sans problème.

Sinon qu’à quarante kilomètre heure dans les gorges de l’Allier on a bien le temps de se délecter du paysage.

Les orgues basaltiques  plongent dans la rivière dans un accord parfait. Par endroit les eaux sont encore prises pas les glaces, l’hiver peine à laisser sa place au printemps. Des villages aux maisons de pierre et aux églises aux clochers à peigne surgissent aux détours de la voie. Des cascades bouillonnent dans la gorge, la végétation est encore engourdie par le froid, des plaques de neige s’incrustent dans l’ombre de l’ubac de la vallée.

Perchés sur les sommets des vestiges de châteaux et de tours de guet surveillent les défilés et les ponts. Nul doute que dans les temps anciens les voyageurs et les marchands devaient s’acquitter de  substantiels droits de péages pour les franchir…

Le train lui continue sa route…

Et ainsi va la vie tranquille dans ces montagnes sauvages et apaisées tandis que la bouillotte du monde siffle sur le réchaud de l’Internet que la course à l’exotisme n’en finit plus de péter plus haut que son …

… que la partie charnue du dos où celui perd son nom.

………………….

(1) En ce temps-là j’étais en mon adolescence
J’avais à peine seize ans et je ne me souvenais déjà plus de mon enfance
J’étais à 16.000 lieues du lieu de ma naissance
J’étais à Moscou, dans la ville des mille et trois clochers et des sept gares (…)

Blaise Cendrars. Prose du Transibérien

….

et des photos…

Juin 26, 2011 - Côté personnel    No Comments

Le cimetière de Prague

Sur le bord d’un sentier dominant un méandre de la jeune Loire,  face au château d’Arlempdes, mon chapeau posé dans l’herbe, je bouquine…

Les pages du « Cimetière de Prague » d »Umberto Eco s’égrènent sur mon Ipad…

… Les gens léchaient les vitrines des parfumeurs où l’on célébrait les miracles du principe tonifiant pour la peau au lait de tortue, du régénérateur des cheveux au quinquina, de la Crème Pompadour à l’eau de banane, du lait de cacao, de la poudre de riz aux violettes de parme, toutes découvertes pour rendre plus attirantes les femmes les plus lascives, mais maintenant à la portée aussi des cousettes prêtes à se faire entretenir parce que, dans beaucoup d’ateliers de couture, on introduisait une machine qui cousait à leur place. L’unique invention intéressante des temps nouveaux avait été un machin en porcelaine pour déféquer assis…


 

Mai 22, 2011 - Côté personnel    5 Comments

Flânerie altiligérienne chez les dames de Lavaudieu.

Il manque beaucoup de choses dans ce billet… Le carillon des messes des villages traversés, la stridulation des insectes, les piaillements des oiseaux, le souffle du vent dans la cime des arbres et cette indéfinissable odeur de campagne… Ce parfum de l’Albaret de mes vacances d’enfant, subtil mélange de genêt en fleur, de bois, de pinède, de pierre chaude et de crotte de mouton…


Heureusement il reste la couleur tendre des champs, les torrents de fleurs qui bordent les chemins.

La route chemine au flanc des volcans assoupis mollement arasés par le temps puis plonge au cœur des hautes futaies, cathédrales de feuillages, transpercées de soleil.

Saint Paulien antique capitale  Velaves est ma première destination, manque de chance le musée est fermé le dimanche! Hier encore le chantier de fouille d’une domus romaine était ouvert et les archéologues assuraient la visite…. Trece timpul… Je reviendrai…

 

A travers le Haut Velay granitique je poursuis mon chemin. Mon GPS facétieux m’envoie sur des chemins de traverse improbables qui se terminent en cul de sac à l’orée d’un bois. Qu’importe ! Demi tour… Le coude à la portière, la route en est encore plus belle.

Au détour du chemin les tours de château de Domeyrat dressent leurs silhouettes de pierre dans le ciel pommelé.


Enfin la douce vallée de la Senouire me conduit tout droit  jusqu’à Lavaudieu. Il fait chaud, l’ombre se fait agréable, promesse d’été et de vacances prochaines.

Lavaudieu et les vestiges de son abbaye romane.

…Saint Robert, issu du chapitre de Brioude fonde l’abbaye de la Chaise-Dieu puis un prieuré de moniales, qui en est dépendant, à Saint-André-de-Comps. Une église modeste est édifiée. Les moniales s’y installent en 1058. En 1487, Saint-André-de-Comps change de nom pour devenir Lavaudieu. Après 1516, la règle du prieuré s’assouplit : les moniales sont désormais des chanoinesses à la vie confortable. Une abbesse indépendante est nommée en 1718. L’abbaye reste active jusqu’à la Révolution (13 occupantes, toutes issues de la noblesse)

La voiture garée au bord de la rivière, me voici flânant  dans les rues du village à la recherche d’un auberge.  Sur la place près de la fontaine je me fais servir une salade auvergnate arrosée d’un petit quart de rouge dans un estaminet tranquille.

Il me reste encore une heure avant la visite du cloître, c’est l’occasion de flemmarder sous les ombrages le long de la Senouire pour bouquiner un bon vieux Conan Doyle sur ma petite liseuse.

 

Point n’est besoin d’un inscription sur internet ou d’une longue queue au milieu d’une horde de touristes pour visiter le prieuré.

Nous sommes quatre en comptant la guide qui nous fait découvrir le lieu. Il ne faut longtemps pour se pénétrer de la douce quiétude de la vie des bonnes dames de Lavaudieu.
C’est peu dire qu’elles étaient aimées et appréciées dans le village, les témoignages de l’époque concordent. Las ! la tourmente révolutionnaire a tout balayé, l’abbaye vendue comme bien national est devenue une ferme. Les vaches se sont vautrées dans les salles conventuelles, le cloître espace de médiation s’est souillé de bouses et d’aboiements de chiens…

 

Mais l’apaisement est revenu… trece timpul … L’antique abbaye renaît de ses cendres, le siècle des cathédrales, des anges de pierre s’impose de nouveau par la grâce des hommes de bonne volonté.

Alors lorsque le temps est venu de reprendre le chemin du Puy au soir d’un bel après midi de printemps auvergnat, en traversant les grands bois de la Chaise Dieu, croisant sur mon chemin le bestiaire des animaux de la forêt : un lapin, un écureuil et un chevreuil,  je me plais à songer à ces temps anciens rythmés par les saisons, le travail des hommes dans cette nature ingrate et magnifique à la fois.

dacosavoile

 
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